LA 2 - La métamorphose de Jean
Objectifs:
* analyser l'étrangeté inquiétante de la métamorphose de Jean
* Montrer la faillite du discours humaniste
* Observer comment Ionesco s'y prend pour rendre possible la transformation sur scène
Pb possible: - En quoi la métamorphose de Jean est-elle terrifiante?
Eléments d'introduction: - Bérenger vient s'excuser de la dispute de la veille avec Jean. Ce dernier, couché et malade présente des symptômes physiques de sa métamorphose: altération de voix, bosse grandissante, mal de tête, teint verdâtre, respiration difficile et des symptômes psychiques: refus de voir le médecin mais le vétérinaire, misanthropie, désir de quitter ses vêtements. B. cherche une cause rationnelle: une crise morale mais B. N'a pas encore compris. Il vient d'annoncer la transformation de M Boeuf en rhino mais surprise: Jean la trouve naturelle.
A l'acte I, Jean est l'homme du devoir réglant sa vie sur des principes rigides et ici il renonce brutalement aux valeurs sociales et morales.
I- La transformation de Jean
* Deux systèmes de valeurs s'opposent: B. défendant la cause de l'homme / Jean défendant celle des rhinocéros.
1/ Le discours inquiétant de Jean: (physique et comprtement altérés)
- voix méconnaissable (didascalie l.5), presque barrissement (l.41 et 44), langage en onomatopées
-> difficulté croissante à formuler des idées.
- Allées et venues chambre-salle de bains mime les déplacements d'un fauve en cage + discours totalitaire de plus en plus violent: multiplication des formules péremptoires sous forme d'assertions primaires et impérieuses l.22-23 "il faut dépasser la morale", l.31 "il faut reconstituer les fondements de notre vie", "il faut retourner à l'intégrité primordiale".
+ un mot d'ordre: la destruction des valeurs sociales l.38 "démolissons tout cela"
+ pensées non abouties avec formules exclamatives qui ne justifient rien l.22-23 "La morale! Parlons-en de la morale, j'en ai assez de la morale, elle est belle la morale!"
=> Dénonciation des thèses antirationalistes avec exaltation des énergies vitales et préférence donnée à la nature contre la culture.
2/ Le raisonnement absurde de Jean:
- L'homme et l'animal sont mis sur le même plan: comparaison l.14 " les rhinocéros sont des créatures comme nous" -> justification par un point commun: rhino et hommes sont vivants.
- Glissement progressif du raisonnement du droit de vie des rhino à la négation du droit à l'existence de l'homme: l.47 "L'homme... Ne prononcez plus ce mot!"
- Jean minimise sa métamorphose: 'il n'y a rien d'extraordianire à cela" l.9, et l.14 "ce n'est pas si mal que ça! Après tout..."
+ Jean justifie sa métamorphose comme un bien car elle est un retour à sa nature première de l'homme, sa vraie nature en somme: "Il faut reconstituer les fondements de notre vie. Il faut retourner à l'intégrité primordiale" l.31-32 + champ lexical du retour à l'origine: verbes "reconstituer", "retourner"; noms "fondements" et "intégrité" associés par contamination à l'idée d'un retour au primordial. -> termes positifs qui masquent la réalité: le retour à l'animalité.
- opposition ac termes négatifs associé à l'humanisme jugé "périmé" l.49
=> Jean suggère un ordre nouveau qui est en réalité une régression.
-> J. raisonne dans un espace différent de celui de B. qui ne peut plus le convaincre l.13 "Il m'est difficile de dire pourquoi" + passage l.28-29 compris dans le sens figuré pour B. et le sens propre pour Jean: la loi de la jungle qui nie les valeures sociales et culturelles d'une part et l'animal qui parle en Jean "J'y vivrai, j'y vivrai" d'autre part.
II- Une réflexion sur le totalitarisme:
1/ Le discours argumentatif de Bérenger:
- Manque de fermeté de B. face au refus d'entendre raison de Jean (rappel début de la pièce + extrait 2 sur leur dispute):
- Jean est exclamatif VS B. interrogateur: l.7 "Que dites-vous là, mon ami? Comment pouvez-vous penser...", l.16 "vous rendez-vous compte de la différence de mentalité?", l.24 "Que mettriez-vous à la place?", l.26 "La nature?"
+ discours ponctué de modalisateurs pour concilier: l.1 "Je vous en prie"; l.10 "Evidemment [...] Pourtant ..."; l.28 "Si je comprends"; l.48 "Je veux dire ..." où il reprend le terme "homme" donné par Jean en "être humain"
-> Volonté de la part de B. de convaincre Jean.
+ B. fait appel à la raison l.35 "Réfléchissez, voyons"
+ B. Ponctue son discours d'adverbes qui montrent sa volonté d'être raisonnable "Evidemment [...] Pourtant" l.10; l.16 "A condition"; l.20 "Tout de même" + conjonction de coordianation (sens causal) "car", l.45
+ B. fait appel au bon sens: l.30 "Mais dans le fond, personne"; l.35 "vous vous rendez bien compte"; l.45-46 "vous le savez aussi bien que moi"
-> Son incrédulité le pousse à réduire les paroles de Jean à une plaisanterie car il ne mesure pas la gravité de la situation.
2/ Une faille dans le discours de B.:
- B. manque de rapidité d'esprit car la nouveauté du discours de Jean le déroute: l.45 "Je vous connais trop bien pour croire"
+ B. refuse d'entendre le sens littéral des mots: "vous plaisantez, vous faites de la poésie", l.39
+ B. se laisse interrompre à plusieurs reprises: l.7, 30, 46, 48
=> Le discours de B. n'est pas efficace face aux propos de Jean. Les deux hommes ne semblent pas se comprendre: ils raisonnent sur dans des plans distincts.
3/ Les références de B. et de J.:
- B. se réfère à des grandes valeurs:
la morale, l.20; la philosophie, l.35; un "système de valeurs" fondé sur "des siècles de civilisation humaine", l.36
-> Tout cela est trop vague pour influencer Jean.
- J. se réfère au "plaisir", l.8; à "la nature", l.25; à la destruction de la morale considérée comme "antinaturelle", l.27
=> Puissance verbale de Jean qui défend la Nature VS celle de B. qui défend la civilisation est peu combative: "je ne suis pas du tout d'accord avec vous", l.33
+ l'ensemble est ponctué par des va-et-vient de Jean dans la salle de bains qui font opérer sa transformation rapidement grâce à l'évolution de son maquillage,
=> Renversement complet des positions éthiques des deux personnages (et comportemental car Jean reproche à B. d'être têtu, l.2): discours de l'acte I où Jean prônait les valeurs traditionnelles est balayé par le retour de l'instinct VS B. retrouve ses valeurs humanistes ici. Mais son opposition est sans effet parce qu'il n'a pour ressouces que des lieux communs de cette pensée humaniste.
Ionesco dénonce le mal ac le perso de J.: brutalité, imperméabilité aux arguments de la raison, éloge du plaisir opposé à la morale -> figure effrayante de la sauvagerie retrouvée. Mais B. n'oppose rien à ce totalitarisme. Son humanisme fini par tout accepter "c'est de la poésie!" à force d'être compréhensif. Mais B. Désapprouve la transformation contrairement à Dudard qui devient un synpathisant des rhinocéros et justifiera sa transformation.
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